Hommage à Quito Mistler

jeudi 25 janvier 2024
par  Jean-François ADNET
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C’est un hommage émouvant que notre ami Michel a rendu au regretté Quito Mistler ancien Président de Landes Auto Rétro, il a été un de mes parrains en 2007, tout le monde l’aimait...

Chères et chers amis,
Merci président, cher Christian de m’avoir confié cette mission de rendre hommage à Quito Mistler, récemment disparu.

Quito, sa famille et sa vie professionnelle.

Quito MISTLER était né à Anvers en 1928 d’un père possédant la double nationalité Belge et Argentine, consul d’Argentine à Anvers exerçant la profession de banquier. Dans certaines familles, il était donné à un des fils le prénom du père : ce fut le cas pour notre Quito. Un inconvénient survint très vite à savoir que chez les MISTLER, lorsque la maman, appelait Enrique, le père et le fils répondaient ou arrivaient en même temps. Le prénom Enrique évolua progressivement pour notre Quito vers le Petit ENRIQUE, puis Enriquito et enfin définitivement Quito pour nous tous aussi.

Quito avait 12 ans lorsque débuta la 2e guerre mondiale. La Belgique fut rapidement occupée et le père de Quito envoya sa femme, sa fille et ses 2 fils s’exiler en France : ils se fixèrent pendant les années de guerre dans le sud-ouest.
À la libération, ils retournèrent Anvers, mais très vite dans les années 1949- 1952 la guerre froide débutait cela inquiéta assez le père de Quito : il appela son frère, sans enfant, installé à Buenos Aires et exploitant d’une papèterie pour qu’il accueille ses 2 fils, l’aîné Carlos et le second Quito. Les 2 fils travaillèrent dans la papèterie de leur oncle. Quito fut envoyé à 2 reprises suivre des stages pour parfaire l’apprentissage du métier : ainsi il séjourna un an et demi au Canada puis un an aux États-Unis avant de rentrer à Buenos-Aires.
Au Canada, il s’acheta une MG TC d’occasion et participa avec elle a de nombreuses courses sur des circuits improvisés : le gonflage de cette mécanique n’avait plus de secret pour lui et il avait édité un manuel que je tiens à la disposition des intéressés.
De retour en Argentine, avec son frère Carlos il pratiqua la voile dans l’estuaire du Rio de la Plata, naviguant jusqu’en Uruguay soit sur l’autre rive du fleuve. Il reprit aussi la course automobile au volant d’une autre MG TC.

C’est en Argentine qu’il se maria avec Jenny que les plus anciens ont bien connue, ils eurent 2 garçons : seul Yves MISTLER est vivant à ce jour. À partir de 1960, sous la dictature de Peron les conditions de vie de vie devinrent plus difficiles : importante inflation, arrestations arbitraires, racket, difficultés dans les affaires et les commerces…
Quito et Jenny décidèrent de s’expatrier et après avoir hésité entre les USA, le Canada, ils choisirent la France qui à cette époque était en plein essor au sein des 30 Glorieuses. Il répondit à une annonce de la papeterie de Mimizan qui cherchait un spécialiste dans la production de la pâte à papier : Quito y fut embauché, il y déroula tout le reste de sa carrière : ses compétences polyglottes lui firent successivement assumer la direction d’une nouvelle usine du groupe à Logrono dans la Rioja, puis le poste de public relation, voyageant dans le monde entier pour le groupe Gascogne, il termina sa carrière dans la tâche d’historien du groupe.

Landes Auto Rétro.
En 1980 une annonce parue dans le journal Sud-Ouest invitait les personnes intéressées à venir participer au café de la gare de Dax à une réunion préparatoire à la constitution d’un club d’automobiles anciennes.
Un homme souriant et de grande classe se présenta à chacun de nous : « Je me présente, Enrique MISTLER, mais appelez moi Quito ».
Il avait dû, lors de ses humanités, s’imprégner de Descartes et du discours de la Méthode : l’avenir nous confirma qu’il en avait retiré toutes les leçons. Ce soir là, seul en possession d’un bloc note et d’un stylo, entouré de béotiens, il débuta pro-tempore le secrétariat de Landes Auto Rétro, poste qu’il assuma avec brio et une fidélité de plus de 25 ans. La délicatesse de Quito faisait qu’il ne se mettait jamais en avant, il fallut le solliciter afin qu’il accepta de devenir président.
Il nous confia qu’il restaurait seul, dans son garage, une Jaguar XK 140 privée de tout son arrière : elle avait succombé aux indélicatesses du climat anglais. A une époque où le mouvement de l’automobile ancienne était balbutiant, il réussit le tour de force de prendre de multiples contacts en Angleterre, trouva des fournisseurs de pièces mécaniques mais surtout deux tôliers formeurs, père et fils travaillant dans un atelier exigu : ils formaient à l’ancienne en tôles neuves toutes les pièces de carrosserie des XK 120-140 et 150 et les vendaient dans le monde entier. Commande passée, avec la remorque du voilier 420 attelé à sa DS, il alla avec son fils Yves, chez ces artisans en Angleterre chercher un arrière d’XK.
Autodidacte de la mécanique il réussit à restaurer et mettre au point ce compliqué moteur de course, assortis de plusieurs systèmes de boulonnerie non métriques : un vrai casse tête. C’est avec admiration et étonnement que nous virent l’XK rouler quelques mois plus tard : pour ma part je n’en avais encore jamais vu !

Dès lors, ce fut entre Quito et sa belle anglaise une passion ; avec elle, il participa à tous les évènements du club dacquois et des clubs environnants : partout connu et reconnu, apprécié de tous pour ses compétences tant mécaniques que linguistiques, sa bienveillance, sa disponibilité et son écoute.
Que de voyages organisés par ses soins et partagés en France comme en Espagne conjuguant les plaisirs mécaniques et ceux de la découverte mais aussi de la culture. Le soir à l’hôtel, s’ajoutait parfois à la convivialité, le talent de musicienne de Jenny pour peu qu’un piano s’offrit à elle.

Puis vinrent ensuite les grands Voyages avec l’Amicale Jaguar dont Quito fut l’un des fondateurs : de grands noms de la course automobiles y participaient Quito avait beaucoup de plaisir à les côtoyer, Bernard CONSTEN, José ROZINSKI . Au retour il nous tenait en haleine nous contant son voyage pour lui rarement émaillé de pannes, car il ne partait pas sans une révision de sa belle, et mettait un point d’honneur à réparer seul. Toujours prévoyant, le coffre de la Jaguar, pourtant exigu emportait un outillage complet et de nombreuses pièces de rechange qui servaient le plus souvent aux amis. Il se disait à l’Amicale Jaguar que seul Quito était capable de démonter et remonter une XK au bord de la route.
Quelques moments privilégiés d’amitié et de partage.

Vers 1992 alors que les Jaguar SILCUT allaient courir au Mans, je ne sais si c’était à dessein, il me proposa de l’accompagner. Nous partîmes ensemble : c’était un anniversaire, celui de la première victoire des Jaguar au Mans. Le matin de la course toutes les Jaguar XK et E de l’Amicale furent lâchées sur le Grand circuit pour quelques tours : pour nous deux ce fut une grande joie, véhicule décapoté, l’XK prenait bien tous ses tours dans une sonorité rageuse, les Hunaudières avalées à chaque fois, l’accélérateur près du plancher, Quito me fit apprécier ses qualités de pilote de course chevronné.

En descendant de sa voiture, j’eus le sentiment qu’il me manquait quelque chose.
Quelques mois plus tard j’allais acquérir une épave du même modèle que le sien : une autre aventure commençait, puisque nous la restaurâmes ensemble à mon domicile. Il connaissait tout par cœur.
Alors que ma voiture était terminée, je remerciai Quito de toute cette aide et ce temps passé.
Il conclut laconiquement dans la langue de Shakespeare : « No mention it ».
Quito nous parraina pour entrer à l’amicale, et il ne partit plus seul : il faut dire qu’aller prendre un départ de rallye avec des XK en Alsace ou aux abords des Alpes suisses ou italiennes constituait tout de même une part d’aventure. Hormis les pays nordiques, l’Europe entière fut notre terrain de jeu avec souvent une prédilection pour les plus Hauts cols Alpins Stelvio, Gavia, Massif de l’Arlberg en Autriche ou Pyrénéens en France, Aspin, Peyresourde, Tourmalet etc. Je puis vous assurer que ces montées et descentes n’avaient souvent rien de raisonnable, mais le lâcher des chevaux avec le bruit d’un moteur XK est tellement enthousiasment.

Je crois au devoir de mémoire ! Que ce moment du passé puisse nous rappeler notre la chance d’avoir pu côtoyer une belle personne et un homme d’exception.

Michel DELEST.


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